Le débat public CIGEO est-il bien sérieux ?

Le débat public du futur stockage des déchets radioactifs s’annonce comme une joyeuse mystification. Mais qui mystifie qui ?

 

Le législateur

Le mode d’emploi du débat public se trouve dans le Code de l’environnement. C’est donc la représentation nationale qui est à l’origine des règles du jeu : un « machin » comme disait le Général qui n’a aucune finalité officielle, si ce n’est d’essayer de faire causer entre eux des gens qui ne le feraient jamais autrement. Officieusement, c’est une autre affaire, le débat public a été conçu comme une prise de température de l’acceptation du projet enjolivée d’un peu de liturgie pour camoufler le concept.

La commission nationale du débat public

Comme toutes les Autorités administratives indépendantes, la CNDP n’a de comptes à rendre qu’à la vox populi. Donc, respect à la lettre des textes fondateurs, pas de vagues, pas d’initiatives malheureuses dans l’accomplissement de la mission. Une fois, la CNDP a fait une erreur de casting en nommant un trublion, pourtant issu de ses rangs. Résultat, le débat public de la centrale nucléaire de Flamanville 3 a bien failli partir en quenouille, pour ne pas utiliser un mot plus précis à la consonance proche. Echaudée, la CNDP ne nomme depuis, au moins dans le nucléaire, que des présidents de commissions particulières à l’unisson de leurs propres convictions.

La commission particulière du débat public

Les membres des commissions particulières sont soucieux de mener à bien leur mission avec enthousiasme : faire un beau débat animé, avec de la vie, des gens qui se parlent, s’engueulent et qu’à la fin tout le monde fraternise autour d’un consensus miraculeusement issu de leurs travaux. Ceux-là ne mystifient qu’eux-mêmes…

Les opposants

Leur objectif est que le projet ne se fasse pas et ils ont très bien compris la fonction thermomètre du débat. Ils ont donc grand intérêt à participer, malheureusement pour eux, ils ne sont pas capables de mobiliser suffisamment de troupes pour faire monter la température jusque dans la zone rouge, alors ils boycottent. Et pour CIGEO, ça boycotte dur ! Rien moins que 42 associations selon Bure Stop[1]. Les motifs annoncés de boycott sont assez réjouissants, celui de FNE qui est pourtant une association sérieuse avec des gens très bien est particulièrement croquignolet : ils sont vexés car la CNDP n’a pas accédé à leur demande de retarder ce débat de 6 mois[2]. Franchement, faire les chochottes sur un sujet aussi sérieux, est-ce bien sérieux ? Les vieux routards du débat public se rappelleront avec émotion le boycott du GSIEN pour Penly 3 au motif que la CPDP ne les avait pas suppliés d’y participer. On a sa fierté quand on est antinucléaire !

L’ANDRA

L’ANDRA est obligée de dire qu’elle est ravie de débattre -et le montrer- alors que sa seule envie, c’est de continuer son projet sans être obligée de se justifier. Quand on sort de Normale sup ou de l’X, version Corps de Mines, croyez-vous qu’on accepte avec plaisir la mise en cause de ses merveilleuses constructions intellectuelles par des bacs moins douze qui ne connaissent rien en trous, argile, déchets et sûreté nucléaire ?

Le public

Le public ne mystifie personne, d’abord il ne vient pas au débat. Pourquoi aller voir une pièce de théâtre absconse, jouée par de mauvais acteurs ?

Par contre, c’est lui qui paye le billet d’entrée avec ses impôts ou ses factures d’électricité : entre 1 et 3 millions d’euros le débat, selon les modalités et l’imagination de la Commission particulière.

 

 

 

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